En pleine refondation de l’État et dans un contexte de crises sécuritaire et humanitaire, le gouvernement de la Transition du Burkina Faso a pris des mesures concernant la privatisation des entreprises publiques. Une liste de quinze entreprises stratégiques avait été initialement protégée de la privatisation, parmi lesquelles la Société nationale burkinabè d’hydrocarbures (SONABHY), la Société nationale d’électricité du Burkina (SONABEL), le Bureau des mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB) et l’Office national de l’eau et de l’assainissement (ONEA) ainsi que l’Office national des télécommunications (ONATEL-SA). Ces décisions ont été révisées au fil du temps, ce qui a permis la privatisation de certaines entreprises malgré leur caractère jugé stratégique.
Pour comprendre ces changements, il est essentiel de revenir sur le cadre juridique évolutif. La loi n°35/94/ADP du 1er juillet 1994, amendée par la loi n°038-2010/AN du 28 octobre 2010, a établi les conditions de privatisation des entreprises publiques. Cette législation a été mise en place pour définir un cadre général aux opérations de privatisation, prenant en compte les nouvelles réalités institutionnelles.
Dans ce contexte, le gouvernement a récemment décidé du retrait de trois entités stratégiques du processus de privatisation. Premièrement, le Bureau des mines et de la géologie du Burkina (BUMIGEB) était initialement prévu pour une restructuration avec transfert partiel de ses missions au privé. Néanmoins, le BUMIGEB reste sous la tutelle de l’État, malgré des dettes fiscales importantes à régler. Deuxièmement, la Société nationale burkinabè d’hydrocarbures (SONABHY) est maintenue dans le giron public, continuant d’assurer la souveraineté du pays en matière d’approvisionnement en hydrocarbures. Troisièmement, le Centre de Contrôle des Véhicules Automobiles (CCVA) avait vu son processus de privatisation impliquer une ouverture du capital à des partenaires privés et publics. En 2010, l’État a transféré une partie des actions à Burkina Contrôle SA, transformant ainsi le CCVA en une société anonyme. Aujourd’hui, l’État cherche à reprendre ces parts pour consolider son contrôle.
Ainsi, pour le CCVA, l’État a initié une procédure de reprise des parts détenues par Burkina Contrôle SA. Cette démarche prévoit une évaluation de l’actif net du CCVA et une indemnisation proportionnelle de l’actionnaire privé, déduction faite des engagements financiers. Ce retour sous contrôle public vise à renforcer la gestion et l’exploitation des activités de contrôle technique et de certification des véhicules.
Par ailleurs, le BUMIGEB, bien que resté une société d’État, traîne un fardeau fiscal considérable de 955 093 788 F CFA. Cette dette inclut l’Impôt unique sur les traitements et les salaires (IUTS), la Taxe patronale d’apprentissage (TPA), et des pénalités diverses. Le règlement de ces dettes reste un impératif pour stabiliser les finances de l’entreprise et garantir sa viabilité à long terme.
La stratégie du gouvernement burkinabè montre une volonté de maintenir un contrôle sur des secteurs clés de l’économie, tout en adaptant ses approches en fonction des défis actuels. Ce retour en arrière sur certaines privatisations illustre un engagement à préserver des instruments de souveraineté nationale face à des crises multiples, tout en cherchant des solutions durables pour renforcer les entreprises publiques.
Par Nicolas Kondombo